Une plateforme numérique a été récemment fermée. Connue pour être un espace virtuel où se déroulaient des faits de pédocriminalité et d’exploitation sexuelle, notamment sur mineurs, son procès peut marquer un tournant dans la lutte contre la traite via internet.
Cette plateforme numérique se présentait comme un espace de chat et de forum accessible à tous. En réalité, cette plateforme numérique sans modération était un haut lieu de l’exploitation sexuelle sur lequel les auteurs de traite, les proxénètes et les clients de la prostitution pouvaient sévir en toute impunité et invisibilité.
Depuis de nombreuses années, des associations de lutte contre l'exploitation sexuelle, en particulier des enfants, plaidaient pour sa fermeture sans succès, se heurtant au droit à la vie privée sur Internet qui protégeait la plateforme. Mais la médiatisation de certaines affaires graves mettant en cause ce site a poussé les autorités judiciaires à lancer une enquête qui a récemment conduit à sa fermeture.
Une enquête d’envergure nécessitant une coopération internationale
Le propriétaire de cette plateforme était un français. Mais pour échapper à la justice française, il a hébergé le site à Guernesey, une petite île de la manche qui fait office de « paradis numérique ». Il a également demandé la déchéance de nationalité française et a immatriculé sa société en Bulgarie. Quant aux serveurs, ils étaient disséminés à travers différents pays d’Europe.
L’enquête a donc nécessité la coopération des autorités judiciaires de huit pays européens pour parvenir à sa fermeture.
Un procès symbolique qui pourrait faire l’objet d’une jurisprudence engageant la responsabilité des plateformes numériques
L’enquête en est à ses débuts. L’instruction n’a pas encore été ouverte. Les prévenus de cette affaire sont le propriétaire du site et sa femme.
Cependant, la fermeture de cette plateforme, symbole de l’ubérisation de l’exploitation sexuelle, est d’ores et déjà un événement historique dans la lutte contre la traite sur Internet.
Aujourd’hui, on ne sait pas encore si l’accusation mettra en cause l’hébergeur, le propriétaire du site ou sa société. Mais pour la première fois, la responsabilité de la plateforme numérique pourrait être engagée pour des faits de traite, de proxénétisme et d’exploitation sexuelle, au moins en tant que complice.
Ce procès pourrait faire l’objet d’une jurisprudence qui s’étendrait à l’ensemble du monde numérique. Dans ce cas, les plateformes virtuelles pourraient être désormais inculpées des faits de traite et d’exploitation se déroulant en leur sein.
Ce serait alors une véritable avancée dans la lutte contre la traite des êtres humains sur Internet, et ce quelques soient les formes d’exploitation, car ce précédent pousserait alors les espaces numériques à contrôler la légalité de ce qui se passe sur leur plateforme pour éviter les condamnations.
Agir contre la Prostitution des Enfants (ACPE)
L’Association a été créée en 1986 pour sensibiliser, en France, sur l’exploitation sexuelle des mineurs d’abord à l’étranger et aujourd’hui en France.
Ses missions sont essentiellement :
Des campagnes de communication
Des actions en justice
De l’aide aux victimes
Du lobbying
Des actions de formation
Article rédigé en collaboration avec Sophie Antoine, responsable juridique à l'ACPE.