Identifier et protéger les mineurs à risque et victimes de traite

En 2021, ECPAT France a dispensé un cycle de formation sur l’identification et la protection des mineurs à risque et victimes d’exploitation sexuelle et de traite dans 16 grandes villes de France et aux aéroports de Roissy et Orly. Les sessions s’adressaient à un public pluridisciplinaire composé de professionnels de la protection de l’enfance (travailleurs sociaux, éducateurs spécialisés, assistantes sociales, chefs de service…), de magistrats, de policiers et de gendarmes.

Ces formations entrent dans le cadre du Second Plan d’Action National de Lutte contre la Traite des Etres Humains élaboré par la MIPROF. Elles ont été menées grâce à un appel à projets lancé par la Direction Générale de la Cohésion Sociale et financées notamment par les fonds de l’AGRASC (Agence de Gestion et de recouvrement des Avoirs Saisis et Confisqués).

Améliorer le repérage et l’identification des mineurs victimes de traite

Ce cycle de formation est né des lacunes observées en termes d’identification des enfants victimes de traite en France. En effet, aujourd’hui, seules la Police, la Gendarmerie et l’Inspection du travail sont désignées pour identifier formellement les victimes. Il n’existe aucune procédure formelle, au niveau national, qui inclurait le partage d’informations et la coordination entre des acteurs diversifiés pour identifier ces mineurs.

De ce fait, qu’il s’agisse de victimes de traite en zones d’attente ou aux frontières, placées dans les services de la protection de l’enfance ou mineurs isolés, nombreuses sont les victimes qui ne sont jamais identifiées.

Le but de ces formations était donc de donner les moyens aux professionnels d’identifier et de repérer les mineurs victimes de traite en leur proposant de construire un faisceau d’indices à partir d’indicateurs de repérage précis, avec le souci de renforcer l’identification précoce des mineurs victimes. Par ailleurs, l’"aller vers" était abordé au cours de la formation, afin d’indiquer aux professionnels comment aller à la rencontre de ces jeunes qui viennent rarement demander de l’aide d’eux-mêmes aux associations, aux services sociaux ou à la police et gendarmerie.

Créer un lien de confiance entre les acteurs pour favoriser la coopération

La coordination et la coopération entre les différents acteurs intervenant auprès des jeunes (associations spécialisées, services de protection de l’enfance, police / gendarmerie et magistrats) était au centre des sessions de formation. Elle est un levier fondamental pour améliorer l’identification, l’orientation et la protection des mineurs victimes de traite, à condition qu’elle soit initiée précocement.

Sur le terrain, les tensions entre les différents acteurs sont souvent dues à une méconnaissance des missions de chacun, créant des attentes décalées les uns vis-à-vis des autres. Un des objectifs de la formation était donc de faire dialoguer les professionnels de chaque corps de métier entre eux afin qu’ils prennent conscience des missions et difficultés de chacun.

C’est le premier pas vers la création d’un lien de confiance qui permettra ensuite la collaboration entre acteurs et le partage d’informations dans le cadre du secret partagé.

Pour amorcer cette coopération, dans chaque formation, des ateliers de groupes mixtes en termes de profession étaient réalisés. Il s’agissait de travailler ensemble sur des cas pratiques.

Ils ont permis de déconstruire les préjugés et aprioris entre acteurs, de prendre conscience des rôles de chacun, de favoriser la confiance mutuelle, et d’initier une future collaboration plus étroite.

Ce maillage entre les acteurs est le garant d’une orientation précoce et pertinente des victimes et d’un accompagnement pluridisciplinaire cohérent de ces mineurs qui peut mener ensuite à leur sortie de l’exploitation et à la construction d’un projet de vie.

Article écrit en collaboration avec Anouk Langrand-Escure, chargée de formation et référente technique sur la traite des mineurs à des fins d’exploitation sexuelle à ECPAT France