
A l’occasion de ses 30 ans, le CCEM a organisé un colloque le 15 novembre dernier dédié à la lutte contre la traite des êtres humains et l’esclavage contemporain. Il a réuni autour de ce sujet plus de 200 acteurs concernés par ce combat.
L’événement s’est tenu en présence et avec le soutien du Conseil de l’Europe, du bureau de l’Organisation Internationale du Travail pour la France, du Barreau de Paris, de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, de la Miprof, et de l’Ambassade de la République des Philippines.
En plus des membres du CCEM, les intervenants étaient des experts et représentants de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), l’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI), du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), du parquet de Libourne, de l’Inspection du Travail, des journaux Libération et La Libre Belgique, de la Strada International, du Collectif « Ensemble contre la traite des êtres humains et de PAG-ASA (Belgique).
D’anciennes victimes ont participé à l’événement pour apporter leur témoignage et leur avis afin de nourrir les débats au regard de leur vécu.
Un phénomène en croissance et de plus en plus visible
En France, grâce au travail de la société civile depuis de nombreuses années, les réalités de la traite à des fins d’exploitation par le travail sont de mieux en mieux reconnues et prises en compte par la société, les autorités judiciaires et la justice. Cette évolution, nécessaire à la lutte contre ce phénomène, le rend également de plus en plus visible.
Aujourd’hui, la traite à des fins d’exploitation par le travail continue de se développer et le nombre de victimes ne cesse d’augmenter, et ce quelque soit le secteur d’activité : travail domestique, monde agricole, BTP et construction, restauration, services...
Ce colloque marque donc une volonté d’unir les acteurs dans la lutte contre la traite à des fins d’exploitation par le travail et d’agir ensemble pour la protection des victimes.
Des axes de plaidoyer à porter pour améliorer la lutte contre la traite à des fins d’exploitation par le travail
Le colloque a été l’occasion de faire le bilan sur le traitement actuel des affaires de traite à des fins d’exploitation par le travail, et d’évaluer les améliorations à y apporter au regard des difficultés rencontrées.
Il en ressort qu’il est nécessaire de continuer à œuvrer en commun pour :
Une meilleure reconnaissance de l’infraction de traite à des fins d’exploitation par le travail par les autorités judiciaires et la justice
Une protection immédiate et inconditionnelle des victimes, ne nécessitant pas de porter plainte au préalable.
Une plus juste indemnisation des victimes en fonction des préjudices subis.
Une meilleure formation des services d’enquête, des magistrats et des inspecteurs du travail sur le sujet de la traite à des fins d’exploitation par le travail afin d’aider à l’identification et la protection des victimes.
La possibilité donnée aux inspecteurs du travail d’entrer dans les domiciles privés pour constater les faits de servitude domestique en cas de signalement.
La suppression de l’immunité des agents diplomatiques, trop souvent source d’impunité dans les cas de servitude domestique.
L’obtention de moyens suffisants pour assurer l’accompagnement psycho-social et juridique des victimes, si important pour leur protection et reconstruction suite aux traumatismes vécus.
L’augmentation des solutions d’hébergement dédiées à la mise à l’abri des victimes.
Des condamnations des auteurs plus conséquentes, en adéquation avec les faits de traite retenus.
Une communication à bâtir en préservant les victimes
Le sujet de l’exploitation au travail en France étant de plus en plus visible, les associations sont désormais sollicitées par les médias à chaque affaire judiciaire.
La médiatisation reste une opportunité intéressante pour sensibiliser le grand public et les instances politiques sur le sujet. Mais elle doit se faire en cohérence avec la réalité du terrain et en prenant soin de préserver les victimes.
C’est pourquoi cette thématique fut abordée lors du colloque, à l’issue duquel il semblait essentiel :
- De travailler ensemble pour harmoniser le discours médiatique entre les acteurs afin qu’il reste cohérent avec la réalité de la traite à des fins d’exploitation par le travail et qu’il appuie le plaidoyer.
- De préserver l’intégrité des victimes lors du traitement médiatique du sujet en fonction de la temporalité de l’enquête.
Télécharger la synthèse du colloque
Le Comité Contre l’Esclavage Moderne- CCEM
Depuis 1994, le CCEM dénonce toutes les formes d’esclavage contemporain partout dans le monde.
Il assure un accompagnement social et juridique des victimes de travail esclave, et de traite des êtres humains à des fins d'exploitation par le travail.
Fort de cette expertise, le CCEM forme et sensibilise les professionnels et le grand public et participe aux instances nationales et européennes pour améliorer les pratiques et la mise en application des lois et des politiques contre la traite.
En 30 ans, le CCEM a accompagné plus de 1200 victimes au niveau national dans plus de 450 procès.
Le CCEM est membre du Collectif "Ensemble contre la Traite des êtres humains".
Article rédigé en collaboration avec Franceline Lepany, présidente du CCEM